La tendance tradwife : retour en arrière ou nouvelle forme d'empowerment ?

Depuis plusieurs mois, la tendance tradwife fait l'objet de débats enflammés sur les réseaux sociaux. Popularisée par des influenceuses telles que Nara Smith ou Hannah Neeleman, cette vision idéalisée du rôle de la femme au foyer séduit autant qu’elle divise. À l'heure où le féminisme prône l'émancipation et l'indépendance financière des femmes, cette tendance soulève de nombreuses questions : simple retour aux valeurs traditionnelles ou régression déguisée ?

Qu'est-ce qu'une tradwife ?

Le terme « tradwife », contraction de « traditional wife » (femme traditionnelle), désigne une femme qui se consacre entièrement à son foyer, à la cuisine, au ménage et à l’éducation des enfants, selon un modèle inspiré des années 50. Le mari, lui, est le principal pourvoyeur financier du ménage. Cette vision genrée des rôles familiaux semble à première vue désuète, mais elle connaît un regain d’intérêt grâce aux réseaux sociaux, où certaines femmes en font une véritable marque de fabrique.

Un retour aux valeurs domestiques ?

Les tradwives se distinguent par leur engagement à tout faire maison : du pain aux produits ménagers, en passant par les repas et parfois même les vêtements. Des influenceuses comme Hannah Neeleman, qui partage sa vie dans une ferme de l’Utah avec ses huit enfants, illustrent cet idéal de retour à une vie simple et rurale. D'autres, comme Nara Smith, adoptent une approche plus moderne et sophistiquée, en associant cuisine maison et esthétisme léché sur Instagram.

Pour beaucoup, cette tendance met en valeur le travail domestique souvent invisibilisé. Après tout, élever des enfants et entretenir une maison sont des activités à part entière, qui méritent reconnaissance et considération.

Entre indépendance et dépendance économique

Si ces femmes promeuvent un modèle basé sur la dépendance financière à leur mari, il est important de noter que les tradwives influentes des réseaux sociaux ne sont pas nécessairement dans cette situation. En tant qu’influenceuses, elles monétisent leur contenu et génèrent des revenus parfois supérieurs à ceux de leur conjoint. En ce sens, elles ressemblent davantage à des entrepreneures du digital qu'à des femmes au foyer classiques.

Mais ce modèle est-il accessible à toutes ? La réalité est plus nuancée : derrière les vidéos parfaitement cadrées se cache un quotidien exigeant et chronophage, difficile à suivre sans ressources financières conséquentes. Pour la majorité des femmes, choisir d’être femme au foyer implique un risque économique non négligeable, notamment en cas de séparation ou de difficulté financière du conjoint.

Une tendance aux accents politiques

Derrière l’image douce et apaisante des tradwives se cache parfois une idéologie plus conservatrice. Certaines, comme Estee Williams, n’hésitent pas à associer leur mode de vie à des valeurs réactionnaires, prônant un retour aux rôles genrés stricts et critiquant ouvertement le féminisme. Le lien avec des mouvances religieuses ou politiques traditionalistes est parfois explicite, renforçant l'idée que cette tendance dépasse la simple nostalgie d’un mode de vie passé.

Un modèle à nuancer

Si certaines femmes trouvent dans le modèle tradwife un épanouissement personnel, il est essentiel de ne pas perdre de vue les implications sociales et économiques d'un tel choix. La glorification d’un mode de vie où la femme est entièrement dédiée à son foyer peut renforcer les inégalités de genre et perpétuer l’idée que l’émancipation féminine est une option, et non un droit fondamental.

En définitive, la tendance tradwife illustre la complexité des dynamiques de genre contemporaines. Entre nostalgie assumée et réinterprétation moderne, elle interroge notre rapport à la féminité, à l’indépendance et aux attentes sociétales. Une chose est sûre : qu'on l'encense ou qu'on la critique, cette tendance n’a pas fini de faire parler d’elle.

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